Laure-Marie Aubertin, étudiante en M2 de Lettres Modernes à Paris-IV Sorbonne, a transcrit par écrit une conversation téléphonique réalisée avec Serge Doubrovsky au sujet de son dernier livre, Laissé pour conte. Cet entretient a été réalisé le 7 novembre 2008.

Laure-Marie Aubertin: Comment expliquez-vous le titre de votre œuvre Laissé pour conte ? Est-ce une référence à la fiction de votre livre, votre « conte » ? Est-ce l'un de vos nombreux jeux de mots qui impliquerait que vous vous tenez aussi pour un « laissé pour compte » ?

Serge Doubrovsky : Oui, bien sûr, c’est un de mes nombreux jeux de mots avec compte. Je me sens pour laissé pour compte, puisque c’est un sentiment que j’ai et que je continue à avoir d’ailleurs. L’homme de chair et d’os, le type qui est moi ne fait pas partie des people, comme on dit aujourd'hui, je ne fais pas partie des médias… c’est pourquoi cela me fait plaisir de recevoir une lettre de vous, qui sort de l’inconnu. On me connaît comme écrivain, Serge Doubrovsky se balade dans les bouquins, mais moi je suis dans mon petit bureau, donc laissé pour compte, c’est aussi ce sentiment… Je n’ai pas tellement d’amis finalement, je m’en aperçois, les gens sont occupés bien sûr. Donc vous avez raison, le titre a deux sens. Et aussi dans la mesure où j’ai raconté dans ce dernier livre des choses que je n’avais pas racontées dans mes autres livres, c’est aussi l’un des sens de ce titre. Par exemple le voyage a Prague, la venue à Paris d’Eliska, il y a beaucoup de choses que je n’avais pas racontées…

L.M.A. : Il y a en effet plusieurs inédits dans ce livre.

S.D. : Oui c’est exact. Pour moi, mon projet a été aussi de boucher des trous narratifs, si je puis dire, des histoires que je n’avais pas racontées et qui pourtant m’avaient beaucoup touché. Il y en a une que je n’ai pas racontée, curieusement, mais je me rattrape aujourd’hui. Je me suis toujours posé la question « pourquoi tu n’as pas raconté ça, parce que c’est quand même une des expériences les plus marquantes de ta vie, et tu n’en as pas parlé ». Je ne pouvais pas, le livre a refusé, je ne sais pas. Alors je l’ai mise dans ce livre que je suis en train d’écrire, c’est mon voyage à Auschwitz. J’avais un ami qui avait épousé une Polonaise et ils m’ont invité à venir passer quelques jours en été à Varsovie. Ils m’ont demandé « qu’est-ce que tu aimerais voir », j’ai dit que je voulais aller à Auschwitz, et ils m’ont emmené et là, ç'a été une expérience tout à fait incroyable, mais je ne l’ai pas écrite dans Laissé pour conte, c’est dans le livre que j’écris maintenant. Donc voilà, ce sont des expériences de ma vie. On ne peut pas tout raconter, il y a des choses très importantes pour moi que je n’ai jamais dites ou écrites, alors je vais le faire dans ce dernier livre, par exemple, au mois de mai 1985, ce devait être avant que je ne commence à écrire Le livre brisé, j’étais invité pour la première fois à faire une conférence en Allemagne à l’Université de Munich, sur quel sujet je ne me souviens plus, ce devait être sur la critique ou Sartre. Jusque là, j’avais toujours refusé d’aller en Allemagne, mais cette fois je suis quand même parti en voiture. J’ai été jusqu’à l’Université de Munich. J’ai été très bien reçu par le professeur qui m’avait invité et j'ai été conduit dans la salle de conférence. J’ai été alors très surpris car c’était une grande salle et elle était absolument pleine. J'ai été très surpris qu’autant d’étudiants s’intéressent au sujet traité... Brusquement, cela m’est sorti malgré moi, je n’avais absolument pas prémédité, je me suis levé, je me suis senti obligé de leur dire : « il y a quarante ans, vous m’auriez envoyé en fumée et aujourd’hui vous me recevez ici. Eh bien, il y a un progrès historique ». Et ils se sont tous levés et j’ai eu une ovation de dix minutes. Je dois dire que pour moi, ç'a a été un moment extraordinaire où il n’y avait plus des boches mais des Allemands. Cela je ne l’ai pas encore raconté mais je vais le faire dans mon livre actuel. Ce sont souvent des épisodes de la guerre qui me sont sortis de la tête.

L.M.A. : On peut d’ailleurs remarquer, pour chacun de vos livres, un souci d’innovation, d’originalité, est-ce primordial pour vous ?

S.D. : Oui, sur le plan formel ils sont construits différemment. Dans Un Amour de Soi, malgré le titre, c’est quand même un livre assez classique. Dans le Livre Brisé, il y a une chronologie interrompue par des chapitres sur Sartre ou autres thèmes mais il y a une histoire qui se raconte. Laissé pour Conte n’avait pas du tout l’ambition d’être une autobiographie au sens classique, mais de raconter des épisodes importants, sans liens, de ma vie que je n’avais pas racontés. Le pont du Pecq, qui saute pour retarder l'avance des Allemands, en ouverture du livre est quelque chose que j’ai vu, que j’ai vécu, qui m'a frappé et qui m’est resté dans la mémoire. Il y a malgré tout un ordre dans Laissé pour Conte, c’est un ordre volontaire. En effet, le livre commence en juillet 40 et il se termine en mai 44, c’est-à-dire quand le narrateur ne sait pas si finalement il sera libéré ou pas, il se termine avant le débarquement. C’est une décision de l’écrivain pour montrer que je suis resté prisonnier de ces années-là.

L.M.A. : Finalement, y a-t-il un ordre implicite dans le classement de vos fragments datés?

S.D. : Là je ne peux pas vous répondre, je n’ai pas récemment relu ces textes de près. Est-ce qu’il y avait vraiment un ordre, ou est-ce que j’ai essayé de boucher ça et là les trous de ma mémoire, je ne peux me prononcer.

L.M.A. : En tout cas, dans la dernière séquence référée à « mai 1944 », vous y racontez votre réclusion clandestine. Si cet épisode est relaté à la fin de votre œuvre, est-ce bien parce que vous le considérez comme le plus important de votre vie ? Ou tout au moins, comme l’un des plus importants ?

S.D. : Oui, certes, cette fin est tout à fait volontaire et c’est un moment où la mort se jouait à pile ou face. Mon père avait réussi à venir, on s’était cachés, mais l’argent que mon père avait amené avec lui commençait à s’épuiser, et nos hôtes, qui risquaient leur vie pour nous, ne gagnaient pas assez leur vie pour nous nourrir, au marché noir, à l’époque. Donc oui, c’était une question de vie ou de mort, c’est pour cela que j’ai voulu clore le livre prisonnier entre ces deux dates-là, juillet 40 mai 44. C'est le symbole de ma vie.

L.M.A. : Donc on pourrait dire que la première et la dernière séquence sont un choix délibéré…

S.D. : Surtout la dernière que j’ai déjà évoquée dans d’autres livres mais pas aussi précisément et sur tant de pages.

L.M.A. : Oui en effet vous consacrez presque trente pages à cet épisode… D’autre part, dans Laissé pour Conte, j’ai remarqué que le cogito de Descartes est plusieurs fois cité. Y attachez-vous une importance primordiale?

S.D. : Absolument…

L.M.A. : Et j’ai aussi remarqué que ce cogito est souvent reformulé pour faire référence à autrui et non pas seulement à vous-même… Pour une autobiographie, j’ai été en effet frappée par la place importante que vous accordez à autrui (famille, amis, femmes, collègues etc.)…

S.D. : C’est vrai… "Elle pense à moi, donc je suis", j’ai répété cette formule en effet plusieurs fois dans le Livre Brisé. Le cogito n’est pas pour moi l'acte d'une substance au sens cartésien. Il ne se suffit pas à lui-même, mais pour moi, c’est quand même l’acte fondamental. Il faut se rappeler que j’écrivais à une époque qui était très structuraliste, où Foucault a publié un article qui avait fait beaucoup de bruit sur "la mort de l’auteur" et donc c’est toute la subjectivité qui était niée. Donc pour moi le cogito cartésien a toujours été un fondement absolu. Même si je le mets à diverses sauces à travers les livres, ce « cogito ergo sum » reste tout à fait capital pour moi. D’ailleurs j’en reparlerai dans le livre que j’écris… Mon père était de sympathie communiste, mon oncle aussi, tout le monde dans ma famille était d’extrême-gauche, et dans ma jeunesse moi aussi. Je me souviens avoir eu dans ma bibliothèque, et je regrette de les avoir perdues au cours de mes voyages, Les œuvres philosophiques du Maréchal Staline ; Il fallait le faire quand même… Mais ce qui m’a guéri de ça, si j’ose le dire, c’est le cogito de Descartes. C’est ce qui me fait exister, l’existence est, en son être propre, subjective. La découverte de cette ultime vérité m’a éloigné des théoriciens marxistes et de leur littérature de l’époque. C’est pour vous dire à quel point le cogito de Descartes est pour moi capital. Mais vous avez raison de le dire, il peut quand même prendre plusieurs formes.

L.M.A. : Peut-on considérer Laissé pour conte comme vos Mémoires où L’Histoire, le monde et les hommes auraient une importance capitale pour vous ?

S.D. : C’est vrai que l’on ne vit pas seul. C’est aussi un cogito sartrien, il se projette dans le monde, il n’est pas isolé dans sa propre substance. Il a sa facticité dans le monde et dans l'Histoire, comme Sartre l'a bien montré…

L.M.A. : Dans Laissé pour conte, vous rejetez plusieurs fois la qualification de « journal intime ». Ne pensez-vous pas cependant que Laissé pour conte pourrait s’apparenter à ce genre? Tant au niveau de la datation que de l’écriture au présent ?

S.D. : Là vous touchez un point très important. L’été dernier j’ai été voir mes filles à New York, je suis parti le mois de juin, et j’ai décidé de tenir un journal intime… mais je n’ai pas pu.

L.M.A. : Pourquoi n’avez vous pas réussi à tenir ce journal intime ?

S.D. : Ce genre d'écriture m'est étranger, mais je l’ai gardé par curiosité, je n’ai pas pu tenir ce journal. Je ne peux pas raconter les choses au jour le jour, mais je peux faire semblant. Le présent constant de la narration est capital dans mes œuvres, et c’est d’ailleurs cela qui fait l’une des définitions de l’autofiction, car cela la différencie de l’autobiographie qui décrit toujours la vie au passé. L'intrusion soudaine du présent chez Rousseau est fascinante par exemple. La fameuse scène du "peigne cassé" qu’on lui reproche l'émeut tant que brusquement il la raconte au présent. Personnellement, je n’ai jamais écrit mes livres au passé mais toujours au présent, et cela même prouve que c’est une fiction. Dans La Nausée de Sartre, il dit qu'il faut « vivre ou raconter », on ne peut pas faire les deux à la fois. Alors quand j’écris une scène au présent permanent, elle est évidemment fictive. Ce sont des choses qui se sont passées en 40, en 60 ou en 80, comme si c'était au moment même. C’est cela, je pense, qui constitue un aspect essentiel de l’autofiction par opposition à l’autobiographie.

L.M.A. : Le présent, c’est peut-être aussi pour rendre les scènes plus vivantes au lecteur?

S.D. : Oui, c’est pour donner plus de force parce que l’on vit au présent ; Le passé, on y pense mais au présent, le futur on y pense au présent aussi, on ne vit que dans le présent. Donc même mon passé je veux le mettre au présent parce que je l’ai vécu comme un présent. Alors évidemment cela peut se rapprocher du journal intime par moment, mais c’est une fiction de journal intime. Je crois avoir écrit quelque part, je ne sais plus où, "lorsqu’une page de ma vie est tournée, il faut l’écrire". Mais je l'écris comme si elle était présente.

L.M.A. : De la même façon, avez-vous eu l’impression d’écrire un « roman » (comme le souligne le péritexte) en écrivant Laissé pour conte. Je pense par exemple à certains passages. Notamment à la fin du fragment « avril 1996 » où vous finissez par « avec toi ça ne sert à rien » qui surprend le lecteur et où vous le faites attendre une dizaine de pages (une séquence, celle de « septembre 1954 », s’intercalant dans la continuité du récit) pour que l’expression « avec toi ça ne sert à rien » soit reprise et explicitée…

S.D. : Je n’ai pas relu cet épisode, je ne peux pas vous répondre…

L.M.A. : Dans une interview, vous avez en effet dit que vous ne vous relisiez pas, seulement les feuillets de la veille…

S.D. : Oui c’est exact. On m’a demandé souvent aux Etats Unis, en Allemagne, en Angleterre ou ailleurs de lire des extraits de mes œuvres, alors j’ai refeuilleté des passages mais par exemple, je n'ai jamais relu et ne pourrais relire de la première à la dernière page Le Livre Brisé.

L.M.A. : Y a-t-il une raison particulière à ce refus ? Est-ce parce que vous auriez voulu changer certains passages ?

S.D. : Je fais ce que le lecteur ne peut pas faire, c’est-à-dire que le lecteur, lui, imagine la scène que je décris, mais moi, je la revis. Et je n’ai pas envie de relire la partie « Disparition », je ne l’ai jamais relue, je ne l’ai jamais citée, je ne peux pas. Cela me serait trop douloureux. Donc non, je ne passe pas mon temps à me relire, je préfère lire d’autres écrivains, mais j’ai quand même refeuilleté quelques uns de mes livres parce qu'on me l'a demandé pour des conférences ou pour des cours.

L.M.A. : Et est-ce aussi pour ne pas influencer votre écriture par ce que vous avez déjà écrit au préalable?

S.D. : Oui, je laisse chaque livre trouver son ton. Il y a aussi une phrase que j’ai dite mais je ne sais plus où, « JE n’écris pas mes livres, ILS s’écrivent à travers moi ».

L.M.A. : Et vous utilisez toujours votre machine à écrire ?

S.D. : Oui oui, ma femme m’avait apporté un grand ordinateur dont son bureau ne voulait plus, mais je ne pouvais pas m'y mettre, j’ai mes habitudes, j’ai besoin du bruit des touches, on ne peut pas se refaire. De plus, je suis habitué aux touches américaines.

L.M.A. : Mais avec un ordinateur, vous pourriez plus facilement vous relire, vous corriger…

S.D. : Il est sûr que je perds un temps fou, mais comme je vous l’ai dit, on ne se refait pas. Le matin je passe un temps incroyable à corriger les erreurs que j’ai écrites le jour d’avant, mais j’aime bien ce travail, il me remet dans l’ambiance. J’écris peut être moins mais mieux

L.M.A. : Pensez-vous qu’ « à raconter ses maux souvent on les soulage » ? Parler de la mort de votre père, du port de l’étoile jaune etc. vous soulage-t-il ? Ou au contraire, éprouvez-vous une certaine souffrance, une difficulté à revivre ces instants intenses de votre existence ? D’une façon générale, quand vous retracez votre existence, quels sentiments éprouvez-vous ?

S.D. : Les deux à la fois. C’est contradictoire… C’est dans tous mes livres, j’entends mon père tousser dans le jardin alors que je prépare le concours de l’Ecole Normale en 47, il était là en train de s’arracher les poumons, et j’étais moi en train de réviser l’histoire grecque et les batailles de Napoléon… Quand j’écris là-dessus, cela me le fait revivre mais en même temps, ça me fait du bien. Mais très curieusement dans le livre que je suis en train d’écrire en ce moment, il n’y a pratiquement rien sur ma mère, j’ai déjà écrit Fils, je ne peux pas revivre cet aspect de ma vie.

L.M.A. : Qu’éprouvez-vous justement en écrivant ce livre, sachant que c’est votre dernier, comme vous me l’avez dit?

S.D. : Ce sont des expériences récentes que j’y écris. A la limite vous pourriez dire que c’est une parodie du journal intime. C’est un faux journal intime. Le livre commence avec mon départ de New York, je me sers comme toujours de l’élément référentiel : "fiction de faits et d'événements strictement réels". J’ai en effet passé des jours à relire des lettres pour décider celles que j’allais garder et utiliser et celles que je rejetais, c’est tout à fait réel, mais en écrivant, celles que j’ai reprises et citées, c’est l’écrivain qui a fait le travail. C’est une réinvention entière bien que le récit soit extrêmement et méticuleusement référentiel, en ce moment, je suis dans la section « retour » de New York. Qu’est ce qu'est Paris pour moi, qu’est ce que représente la France pour moi… mais c’est une recréation, ce n’est pas du tout la pensée que j’ai eue le jour où je suis rentré, je ne me souviens plus de mes pensées à ce moment-là. Je réimagine mes sentiments quand je suis rentré à Paris, donc c’est une invention bien que ce soit référentiel. Les journées et les pensées que je décris obéissent aux lois de l’écriture, et pas seulement de la mémoire. Donc c’est un roman même quand le texte a l’air d’être fidèlement référentiel.

L.M.A. : C’est parfois difficile en effet de distinguer la part fictionnelle et la part autobiographique de votre œuvre…

S.D. : J’ai été par exemple bien amené à aller à Prague en septembre 68, cela s’est passé comme je le raconte mais j’ai réinventé tout dans l’écriture, je me suis documenté, je ne me souvenais plus du nom des rues. Pour remédier à cela, j’ai pris un guide touristique de la Tchécoslovaquie. C’est la reconstitution de son expérience par le romancier. C’est aussi une fiction parce que j’écris au présent comme si j’étais en train de le vivre, alors que j’écris des années après…

L.M.A. : Vous vous appuyez souvent comme cela sur des documents ? des guides touristiques ?

S.D. : Dans certains cas oui, pour la Dispersion, j’ai beaucoup lu de documentations et de livres d’histoire. Les citations que je fais des journaux collaborateurs des années 40, je n’aurais pas pu les inventer et en même temps c’est de la fiction lorsque je cite des passages exacts de ces journaux, comme si j'étais en train de les lire. « EXTERMINONS LES JUIFS » en capital, je l’ai lu, mais évidemment j’ai relu des livres sur la France sous l’Occupation. Je ne pouvais pas me souvenir de tous les noms de journalistes collaborateurs de l’époque. J'ai fait beaucoup de recherches (aspect référentiel), mais je présente comme si j'étais en train de vivre ces événements (aspect fictionnel).

L.M.A. : Vous interrogez aussi parfois votre famille, comme votre sœur par exemple, pour vous aider à vous souvenir de tous ces événements ?

S.D. : Oui, la vie de mon père par exemple je la connais surtout à travers les histoires de ma mère parce que lui n’était pas tellement bavard sur lui-même. Je n'ai jamais su vraiment comment il était arrivé en France. Donc il y a eu documentation mais pas quand même comme un historien, si je puis dire. Pour la visite de Prague, j’ai pris un guide touristique pour savoir où se trouvait exactement le tombeau de Kafka et aussi la vieille synagogue que les Allemands n’ont pas détruite, très curieusement. Ils voulaient détruire entièrement le peuple juif, mais ils voulaient qu’il reste des traces. Alors ils n’ont pas fait sauter cette synagogue, la plus vieille d’Europe. Cela il a fallu que je le lise dans un livre.

L.M.A. : Puis-je me permettre de vous demander si toutes les lettres transcrites dans Laissé pour conte sont véridiques ? Avez-vous inventé ou retouché certaines lettres?

S.D. : Absolument pas, et non seulement dans Laissé pour Conte, mais aussi dans Un Amour de Soi où il y a beaucoup de citations des lettres de Rachel. Jamais je ne me permettrais d'altérer ces lettres, même si je choisis les passages cités.

L.M.A. : Et toutes ces lettres, vous les avez donc conservées ?

S.D. : Oui, en ce moment, là devant moi, j’ai des sacs remplis de lettres que j’ai encore consultées pour écrire mon livre actuel. Evidemment j’indique les passages que j’ai supprimés parce que, vous l’avez remarqué, quand il y a une distance, un blanc dans une lettre, il y a des passages qui n’ont aucun intérêt littéraire. Quand cela n’a pas d’intérêt, je coupe le passage.

L.M.A. : Mais vous vous basez quand même essentiellement sur votre mémoire…

S.D. : Oui c’est quand même l’essentiel. J’insiste beaucoup sur les trous de cette mémoire. Dans le Livre brisé, « trous de mémoire », le « trou des trous », etc. Le mot « trou » est un mot essentiel pour moi. Alors à la fois j’ai une mémoire fidèle et une mémoire trouée, tout à fait éparpillée. Je n’ai pas une mémoire exacte, mais il y a des fragments de mémoire qui eux s’imposent avec violence…

L.M.A. : Et cela, surtout pour les événements qui vous ont marqués comme la guerre par exemple…

S.D. : Exactement, il y a une scène que j’ai dans les yeux, dans le cœur, qui était horrible, celle de ma vie… c’est le 12 juin 40, mon père m’a permis de sortir jusqu’au coin de la rue de l'Arcade, là j’ai vu les camions allemands bourrés de jeunes soldats. Ils avaient la poitrine à découvert, parce qu’il y avait un soleil tellement fort à ce moment-là, au mois de juin… ils avaient leur fusil entre les genoux roulant le long du boulevard Hausmann, ça je ne peux pas oublier.

L.M.A. : Ce sont des événements qui doivent marquer en effet…

S.D. : En effet, j’ai vu Paris comme personne ne peut le voir aujourd’hui et Dieu merci. Tout était fermé, ma mère et moi, on a été acheter les dernières provisions au Felix Potin, qui était la marque de l’époque, pour acheter tout ce que l’on pouvait manger. J’ai donc vu Paris vide, et ça ne peut pas s’oublier. Il y a des choses comme celles-là qui m’ont frappé pour le reste de mes jours…

L.M.A. : Ou quand votre professeur Grosclaude vous a demandé de ne plus revenir en classe…

S.D. : C’est exact, je n’aurais pas pu inventer pareille scène. Et en effet, c’est tout à fait après cet avertissement, en novembre 43 que le policier habillé en civil est venu aussi nous avertir que dans une heure il allait nous arrêter. Sans ce policier-là, il n’y aurait pas de Serge Doubrovsky. Donc ces moments-là, comme lorsque la cloche de notre jardin a sonné, là je n’ai pas besoin de documents. Il y a des scènes obsessionnelles… Un écrivain a en effet droit à des obsessions mais pas à des redites.

L.M.A. : Dans certaines lettres de Laissé pour Conte, il y a un prénom abrégé "CL." Je me suis posé la question de savoir pourquoi…

S.D. : En fait, son vrai nom est donné dans Fils, elle s’appelle en effet Claire, mais ladite Claire m’a demandé de ne pas écrire son nom dans mes livres. Alors j’ai gardé le « Cl. » et je l’ai alors appelée Claudia. J’ai quand même inscrit « Cl. » pour que ce soit vrai, je ne veux donc pas détruire la vérité référentielle, mais je n’écris pas « Claire ». Et ma sœur, quelqu’un pourrait s’étonner, après avoir lu tous mes livres, qu’il n’y ait pratiquement rien sur elle. C’est parce qu’elle m’a dit : « je ne veux pas que tu parles de moi », alors que j’aurais tout un roman à faire sur ma sœur. Mais je ne le ferai pas comme elle me l’a demandé et je ne veux pas lui faire la moindre peine. Dans la réalité de la vie, elle a une importance énorme pour moi… Mais on n’a pas toute la liberté pour les êtres que l’on aime. Par exemple, dans l’Après-Vivre, l’héroïne s’appelle Elle, car elle m’a dit qu’elle ne voulait pas voir son nom…

L.M.A. : Dans Laissé pour Conte aussi il y a plusieurs séquences où vous faites référence à « Elle »…

S.D. : Oui et même dans le livre que j’écris maintenant, il y a une séquence sur « Elle ». Même après sa mort, je respecte son droit. Il y a un problème terrible dans ce genre de livre, pas seulement pour moi mais pour tous ceux qui aujourd’hui pratiquent l’écriture de soi, c’est…

L.M.A. : L’Autre en fait…

S.D. : Oui, l’Autre ! Dans une interview que j’ai donnée à une revue américaine, ils m’ont interrogé et ils ont donné comme titre de l’interview traduit, en français, « écrire est un acte profondément immoral ». Ca m’a toujours posé problème car j’ai toujours voulu être le moins immoral possible, cela m’a gêné pour certains passages, mais on n’a pas tous les droits, alors j’ai rusé, j’ai utilisé « Elle » au lieu de son nom, pour Claire, j’ai mis « Cl. » et après « Claudia ».

L.M.A. : Avez-vous déjà songé à écrire un roman en anglais ?

S.D. : J’ai songé à écrire une partie de mon présent livre en anglais mais ça n’est pas possible.

L.M.A. : Parce que vous ne voulez pas ? vous ne pouvez pas ? Pourquoi ?

S.D. : Commercialement ce n’est pas vendable. Un livre écrit en français avec des parties en anglais, avec la traduction en dessous, ce serait grotesque.

L.M.A. : Et écrire entièrement en anglais…

S.D. : Je ne peux pas écrire entièrement en anglais. Ce n’est pas ma langue malgré tout. En anglais je peux écrire des articles de critique, des fragments romanesques mais pas entièrement un livre, ce n’est pas possible.

L.M.A. : D’autre part, vous avez écrit « Fiction d’événements et de faits strictement réels ». Est-ce important pour vous que tous les éléments de votre livre soient véridiques ? Pensez-vous n’avoir rien caché ? n’avoir rien modifié, remanié, corrigé par rapport à votre vie réelle ? Avez-vous l’impression d’être objectif lorsque vous écrivez ?

S.D. : Non au contraire, c’est radicalement subjectif. Mais pour le fait d'être « véridiques », au sens de « fiction d’événements et de faits strictement réels », un historien pourra aller vérifier que le 12 juin 1940, les Allemands allaient bien dans le sens aujourd’hui interdit, sur le boulevard Hausmann mais ce sont eux qui choisissaient leur sens à l’époque… avec la place de l’Opéra, je ne sais pas si vous connaissez Paris, cette place de l’Opéra balafrée par ce drapeau à croix gammée qui couvrait tout un bâtiment, on ne peut pas oublier cela, et les indications de circulation en Allemand… Donc en sens « véridiques » oui, « objectif » oui, mais je ne prétends quand même pas être historien de la Seconde Guerre Mondiale. Je suis un témoin, mais pas un historien. Quant aux choses cachées, si, il y a des choses qui n’ont aucun intérêt littéraire comme les problèmes de santé, etc… Il y a des choses que je considère comme inintéressantes, importantes dans la vie réelle mais totalement sans intérêt sur le plan littéraire alors il y a un tri littéraire des faits…

L.M.A. : C’est aussi un des aspects de l’autofiction : sélectionner les épisodes de votre vie…

S.D. : C’est exact. Je trie mais je ne triche pas ! Car ce sont des événements qui se sont réellement passés. C’est de la fiction parce que je le construis comme un roman. Je construis un texte qui doit être lu ainsi, qui devrait avoir un suspens romanesque. Le Moi n’est alors plus quelque chose de chronologiquement, logiquement construit. Dans Laissé pour Conte, on a des fragments qui peuvent passer de 1990 à 1940. Un être humain est un mélange de tous les temps et de tous les lieux qu’il a connus. Pour moi un livre autofictionnel doit soutenir un intérêt romanesque. Il y a une phrase remarquable quand Napoléon était parti en exil à Saint-Hélène et que son historiographe l’avait suivi là-bas, rapporte que Napoléon a dit : « quand même quel roman que ma vie! ». Mais sans être Napoléon, je considère ma vie est un roman. Je suis toujours en contradiction avec moi-même, il y a deux prénoms, deux personnalités, deux pays, deux langues, deux cultures, etc. Donc ma vie se prête facilement à la mise en roman, il y a sûrement d’autres vies moins faciles à transcrire. Ce que je vais écrire demain matin par exemple, qui est l’arrivée place du Trocadéro. J'y fais ma promenade habituelle, et là je décris les souvenirs de ma mère et de mon oncle, qui, eux, ont connu le palais du Trocadéro, et moi aussi d’ailleurs. Je raconte alors tous les souvenirs que j’ai des souvenirs de mon oncle et de ma mère, il est évident que je ne fais pas cela quand je me promène, c’est ma promenade que je fais mais dans le roman.

L.M.A. : Beaucoup de séquences sont décrites d'une façon très précise, avec énormément de détails. C’est l’exemple aussi des nombreux dialogues en langue française ou anglaise que vous transcrivez en italique. Il me semble qu’il soit impossible de se souvenir ainsi de tous les mots employés avec exactitude, est-ce donc un exemple de la part fictionnelle de votre œuvre ? Qu’en pensez-vous ?

S.D. : Oui, dans l’autofiction, les dialogues sont des inventions. Dans Nadja d’André breton, au début il raconte sa rencontre avec Nadja, il y a quatre pages de récits que Nadja lui dit et cinq pages de ce qu’André Breton lui répond, et à la fin, il ajoute « et caetera », il se moque des gens. Personne au monde ne pourrait se souvenir de quatre pages de conversation. Justement chez Rousseau il n’y a pas de dialogues, ou alors très courts.

L.M.A. : Mais y a-t-il quand même des phrases exactes?

S.D. : Oui il y a des phrases qui m’ont marqué, des phrases que mon père disait… A l’époque il y avait des compositions, une fois par trimestre, et nous étions classés par ordre… Une phrase de mon père qui m’est toujours resté : « à la prochaine composition, si tu es premier, tu auras cent sous », c’est-à-dire cinq francs. A l’époque c’était une somme énorme pour moi. « Si tu es deuxième, tu n’auras rien ». C’est une phrase que je ne peux pas oublier. Donc il y a des phrases qui ont réellement été dites mais lorsque vous voyez des dialogues, ce sont des inventions de l’auteur. Les dialogues sont l’indice même de la fictivité. Mais dans Un amour de Soi, j’ai transposé en dialogue des parties d’une lettre que Rachel m’avait envoyée. Donc là ce sont des choses qu’elle a authentiquement dites. Mais c’est rare, la plupart du temps, c’est inventé. Avec le présent de la narration, c’est un indice de fictivité.

L.M.A. : Et d’une façon générale, je voulais vous demander si vous considérez Laissé pour conte comme une œuvre bilan de toutes les précédentes ? L’originalité et l’innovation sont-elles déterminantes pour vous dans l’élaboration d’une œuvre?

S.D. : Oui, à l’époque, je croyais vraiment que Laissé pour Conte serait mon dernier livre… mais maintenant, j’ai une raison plus solide de savoir que j’écris vraiment mon dernier livre parce qu’à mon âge, j’ai encore deux ans de travail devant moi, ça me fera 82 ans… et seuls les grands génies comme Victor Hugo peuvent écrire jusqu’à un âge avancé… Quant à l’originalité, j’y fais attention vis-à-vis des œuvres que j’ai déjà écrites.

L.M.A. : Vous écrivez à un moment dans Laissé pour Conte, « relater QUOI, raconter QUOI, me serre la gorge, m’étouffe, étranglé, étranglé d’angoisse, page blanche d’une existence blanche » : Etes-vous angoissé lorsque vous écrivez ? Avez-vous éprouvé des difficultés dans la rédaction de Laissé pour conte ?

S.D. : Non je n’éprouve jamais de difficulté à écrire. Ce qui arrive, c’est que je déchire ce que j’ai écrit la veille, mais au moment de l’écrire je dirais que mon écriture est « quasi-automatique », ce n’est pas vraiment l’écriture des Surréalistes mais presque, je laisse les mots venir, ils s’accrochent les uns aux autres… l’assonance, la dissonance, tous ces procédés-là me sont très chers. Cela fait aussi progresser le texte. Je me suis servi de l’aspect musical des mots pour que les phrases s’enchaînent les unes aux autres. Je n’ai pas confié la progression de mon texte à une pensée préétablie, mais j’ai quand même toujours une certaine idée de la progression que va suivre mon œuvre, surtout que dans le cas présent, il y a déjà 268 pages, le livre prend donc une forme, mais je ne sais pas ce que je vais écrire par exemple demain matin. C’est aussi cela, le plaisir d’écrire…

L.M.A. : Vous avez en fait seulement certains grands thèmes, certains grands sujets en tête…

S.D. : J’ai une idée des scènes dont je vais parler, donc c’est pour cela que ce n’est pas de la vraie écriture automatique, quand par exemple Desnos prenait de la mescaline, la drogue des surréalistes, il devenait complètement inconscient, et dictait des poèmes. Ce n’est pas mon cas. Je laisse les mots s’assembler eux-mêmes mais consciemment, et sans mescaline.

L.M.A. : J’ai été littéralement émerveillée par votre façon d’écrire. Eprouvez-vous du plaisir à façonner ainsi le langage, à créer des jeux de mots… Pensez-vous que cela soit une contrainte d’écriture ou au contraire, une sorte de libération ?

S.D. : J’aime bien me libérer du langage convenu, plonger dans la langue. J’ai une passion pour les mots. Mais le problème, c’est que, quand je ne suis pas sûr de l’orthographe d’un mot, j’ouvre une page de dictionnaire, mais j’en ai pour une demi-heure avant de pouvoir me remettre à écrire… C’est tellement fascinant tous les mots qu’il y a autour, que l’on ne connait pas… Donc oui, il y a un plaisir des mots. C’est une liberté mais aussi une dépense d’énergie.

L.M.A. : Pourquoi avez-vous choisi de réduire au maximum la ponctuation de votre texte ?

S.D. : Cela dépend des textes… Dans Un Amour de Soi, il y a de la ponctuation. Dans le livre que je suis en train d’écrire en ce moment, il y a des passages sans ponctuation avec des blancs. Il y en a d’autres avec des virgules et des points.

L.M.A. : Pensez-vous que c’était une contrainte pour votre écriture ? Est-ce que vous vous êtes senti plus libre dans la rédaction?

S.D. : Il y a parfois de la parataxe avec des phrases très courtes et des points. Ce sont les mouvements de pensée. Je laisse des blancs lorsque je perds le fil de mes pensées par exemple. C’est un moyen de suggérer que là on plonge dans la subjectivité de celui qui est en train de penser. On pense en même temps que lui. C’est selon ce que je veux dire. L’écriture a un rapport différent au langage.

L.M.A : Ce qui m’a surprise dans Laissé pour conte, c’est que la majorité du texte ne comporte pas de points ni de majuscules sauf dans la séquence avec votre analyste Akeret…

S.D. : Parce que ce n’est plus du roman à ce moment-là, mais un pamphlet. Alors je retrouve la ponctuation normale… j’ai inséré là un passage non romanesque. Il ne s’agit plus de l’écriture automatique, mais un passage très ordonné, méticuleusement ordonné… Il ne ressemble pas au reste du livre mais c’est volontaire. Je glisse, dans Laissé pour conte, des épisodes que je n’avais pas racontés ailleurs. En fait la ponctuation, ce n’est pas pour que je sois plus libre, c’est parce que le lecteur lit différemment selon la manière dont un texte est ponctué. Les changements de ponctuation correspondent donc à ce que je voudrais que le lecteur ressente. Voilà aussi pourquoi je n’ai jamais écrit de journal intime. C’est que le journal intime est fait pour vous, alors que moi, je n’écris jamais pour moi. Cela implique qu’il y aura toujours un lecteur. C’est fait pour être lu. Je n’écris que parce que j’espère qu’à l’autre bout du texte il y aura quelqu’un pour le recevoir. Si je pensais qu’on ne me lisait pas, je n’écrirais pas. Tandis que le journal intime s’écrit pour soi, pour le plaisir peut-être de le montrer à sa famille, c’est autre chose. Donc même si mon écriture ressemble parfois au journal intime, le lecteur est pour moi essentiel. La manière d’écrire dépend aussi de l’effet que je veux produire sur l’esprit du lecteur.

L.M.A. : Et trouvez-vous que votre œuvre pourrait se rapprocher de celle de Patrick Modinao, Livret de Famille ? Notamment dans les thèmes abordés (famille, guerre etc.), le style adopté, le genre de son écrit ?...

S.D. : Oui, mais chacun à sa manière. Lui ne peut le faire que par l’imagination parce qu’il est né en 1945, il n’a pas connu la guerre, mais son père a été impliqué dans toutes sortes d’affaires et donc cela l’obsède dans toutes ses œuvres, mais ce ne peut pas être de la même manière que moi. La deuxième guerre mondiale, pour moi, ce n’est pas de l'ordre de l’imagination, on écoutait la radio tous les jours par exemple. J’aime beaucoup Modiano, mais bien qu’obsédés par la même période de l’Histoire, on ne peut pas l’écrire de la même manière parce que l’on ne l’a pas vécue de la même manière.

L.M.A. : En effet, en lisant Modiano, j’ai eu l’impression qu’il y avait davantage de passages fictifs que dans vos œuvres. Plus particulièrement, dans Livret de Famille, le passage entier de la chasse est inventé...

S.D. : Dans Fils, j’ai bien écrit « fiction d’événements et de faits strictement réels », il n’y a jamais vraiment de passages qui soient entièrement fictifs. En tout cas, il y a mille manières de concevoir l’autofiction. Avec Vincent Colonna, nous sommes en contradiction totale par exemple. Pour lui, l’autofiction, c’est l’utilisation de son propre nom mais pour s’inventer une existence complètement différente de la sienne alors il cite des exemples comme la Divine Comédie de Dante, etc., et c’est aux antipodes de ce que je cherche à faire. Je n’écris jamais des fragments qui appartiendraient à une existence que je n’ai jamais eue. Chaque auteur est à la croisée de chemins littéraires différents et heureusement, comme cela, il y a des œuvres différentes…

Publié par Isabelle Grell