Ecrivain polymorphe aux inspirations cosmopolites, au(x) style(s) toujours accessibles et au lectorat international, le Péruvien Mario Vargas Llosa, 74 ans, reçoit un prix Nobel difficilement contestable.

Vargas Llosa, écrivain du monde

Ecrivain polymorphe aux inspirations cosmopolites, au(x) style(s) toujours accessibles et au lectorat international, le Péruvien Mario Vargas Llosa, 74 ans, reçoit un prix Nobel difficilement contestable.

Son nom traînait depuis si longtemps sur la liste qu’on l’avait rangé parmi ces éternels nobélisables jamais nobélisés ! A regret, car Mario Vargas Llosa, l’Harlequin péruvien, mérite sans conteste que l’on couronne son incroyable polymorphie – du polar à l’érotisme en passant par l’autofiction, il n’est que très peu de genres romanesques qu’il n’ait explorés. Son inspiration quasi-totale – Vargas Llosa puise dans les littératures américaines, françaises, hispaniques… Son accessibilité – il appartient à cette famille réduite des nobélisables lisibles par tous. Les thèmes uniques, altiers, qui traversent son œuvre – et se fondent en une fascination pour l’absolu.

Ses personnages la partagent souvent, chacun à leur façon : le Gauguin du Paradis- un peu plus loin. Pantaleon, maquereau d’élite et militaire exemplaire (Pantaleon et les visiteuses). Le prophète de Canudos prêchant la fondation de son phalanstère religieux et séditieux (La guerre de la fin du monde). Les destins des héros de Llosa ressemblent à des asymptotes –ils tendent à l’infini vers une perfection artistique, mystique, normée – quand les romans de Llosa, eux, se referment souvent en donnant l’impression d’avoir atteint celle qu’ils visaient.

Ainsi en va-t-il de ses chefs d’œuvres : La tante Julia et le scribouillard, à la fois autofiction et roman sur la narration exhaustive. La ville et les chiens, sur sa jeunesse en pensionnat militaire. La fête au bouc, à ranger parmi les plus grands romans de dictateurs avec L’automne du patriarche de Garcia Marquez et En attendant le vote des bêtes sauvages d’Ahamadou Korouma. Son essai sur Hugo (La tentation de l’impossible), sa double fiction sur Gauguin et Flora Trisan (Le Paradis- un peu plus loin)… Mais on peut modifier cette liste presque à loisir. Car comment comparer les textes de Vargas Llosa entre eux ? Aucun ne se ressemble, et l’auteur réinvente son style presque à chaque nouveau livre. SI bien que mille portes s’ouvrent dans son œuvre.

On peut choisir de l’aborder par l’humour - et par les frasques de Pantaleon et les visiteuses, satire hallucinée des mœurs péruviennes dans lequel un pieux lieutenant chargé de calmer les ardeurs des garnisons sylvestres monte, sur les ordres de l’état major, une compagnie de prostituées qu’il organise comme une armée. On peut y entrer par le suspense policier (Qui a tué Palomino Molero ?). Pour un grand voyage dans une épopée brésilienne et néanmoins tolstoïenne (La guerre de la fin du monde). Par goût des intrigues amoureuses (Tours et détours de la vilaine fille). Pour en savoir plus sur Flaubert (L’orgie perpétuelle)

Aux lecteurs français, l’œuvre de Vargas Llosa offre une porte privée : celle de la littérature française, comme le rappelle en ce moment même l’exposition que lui consacre la maison de l’Amérique latine. En avril 2008, Le Magazine Littéraire publiait justement sur son site un article sur sa francophilie littéraire. Nous le ressortons ici en espérant que cette promenade dans une œuvre au fil de ses influences françaises vous donnera envie d’y plonger plus avant…

http://www.magazine-litteraire.com/content/Homepage/article.html?id=16809