Philippe Forest, une vie à écrire




On peut dire que l’œuvre de Philippe Forest se situe parmi les plus remarquables dans le champ littéraire français contemporain. Couronnée en 1997 par le Prix Femina du premier roman, elle a reçu depuis bien d’autres prix pour ses six romans et compte aussi de nombreux essais publiés notamment chez Gallimard et Cécile Defaut. Mais elle constitue en réalité beaucoup plus qu’une œuvre parmi d’autres dans l’époque contemporaine par la force d’interpellation qu’elle exerce sur le public, les autres romanciers de sa génération, les critiques enfin. Jouant de l’extraordinaire plasticité du roman et s’interrogeant sur les questions de modernité et d’avant-garde, comme sur les risques et parfois les méfaits des théorisations de tous bords, elle vise à renouveler les formes d’écriture en jouant d’une forte transitivité à l’égard de ses lecteurs : l’expérience personnelle est au cœur de sa démarche, jusqu’au dépassement parfois de l’auto-fiction, dans le souci d’établir ou de rétablir le lien entre le roman et le réel, entre le roman et la vraie vie, fût-ce au prix d’une confrontation de la littérature à son aporie. Comme nul autre, Philippe Forest manifeste la dimension éthique de l'autobiographie. Il réintroduit une temporalité de la continuité et lutte contre les formes de dépersonnalisation et de fragmentation du monde comme d’un certain art contemporain ; il renoue avec une intelligence du vivre comme avec une forme œuvrée de la littérature, fondée sur la reprise, la fresque, voire l’épique, tout en privilégiant les tonalités de la mélancolie et de la douceur. Il confronte ainsi le roman aux grands démons qu’il avait peut-être eu tendance à évacuer – en France du moins : la mort, la perte, la catastrophe, le cataclysme… Cette œuvre affronte l’intempestif dans un geste de partage et d’empathie qui remet l’expérience humaine au cœur de toute entreprise créatrice.

Essayiste, co-rédacteur de la NRF et collaborateur régulier de la revueArtpress, Philippe Forest met lecteurs et critiques au défi d’une analyse qui devra prendre en compte sa propre réflexivité. Ses travaux touchent également au cinéma, à la photographie, aux relations entre littérature et arts. Traduit dans de nombreux pays, son entreprise de créateur et de critique est ouverte aux littératures étrangères, japonaise et américaine au premier chef, mais aussi européennes et sud-américaines. Son ouverture à la culture de l'autre revendique, selon l'expression qu'il emprunte à Proust, « la beauté du contresens ».

Nous nous proposons d’organiser le premier colloque consacré à Philippe Forest, qui vise à explorer les différents aspects de son œuvre.

Ce projet est porté par quatre universités, Duke University, Paris 7, Paris 3 et Cergy-Pontoise. Le colloque se tiendra en différents sites les 14, 15 et 16 janvier 2016. Nous vous remercions de nous faire parvenir une proposition de communication avant le 31 octobre 2014, à l’adresse suivante : lz2@wanadoo.fr.

Aurélie Foglia-Loiseleur, Catherine Mayaux, Anne-Gaëlle Saliot, Laurent Zimmermann

Mise en ligne : Arnaud Genon