« Une famille comme les autres. Le temps d’un leurre. » C’est à ce point de départ que s’ouvre le nouveau livre d’Isabelle Flaten dont le titre, La folie de ma mère, précède la mention « roman »1. Autobiographique sans doute parce qu’il prend aussi les allures d’une longue lettre. Le « je » d’une fille à sa mère « tu ». De la naissance de l’une à la mort de l’autre, ce sont des archives de réactions, de regards, de silences et de mots tantôt plus hauts ou plus bas que les autres qui mobilisent l’écriture prise au défi de la mémoire appelée à se préciser, vigilante à l’égard des souvenirs et du flou qu’ils portent en eux. Isabelle Flaten les écrit et à mesure des pages les élucide. « Rien ni personne n’est fiable. Je commence à m’égarer. Nous ne sommes pas comme les autres, plus même une famille et je ne suis pas pareille que mes camarades de classe. Je prends conscience d’être une anomalie. »

Pourtant… tout aurait pu la rendre sympathique cette mère. Son hospitalité, ses fantaisies bohèmes, ses libertés, sa volonté de bien faire et de défaire. Mais toujours dans l’ombre d’une ambivalence incontrôlée et qui dit tout d’une vie banale morcelée par la tentation du fossé. « Je ne sais plus qui tu es, ni pourquoi tu fais tout ça. Et encore moins qui je suis. Sinon un truc bancal. Quand ça te prend, tu me recadres le physique, m’obliges à marcher dans le couloir un balai coincé sous les coudes pour redresser ma vilaine carrure. Si je dis une grossièreté, tu siffles : mais d’où elle sort celle-là ? De ton ventre peut-être, pas sûr… Quand j’imite une de tes amies et te fais rire, tu m’appelles « le phénomène », c’est un compliment. »

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