ÉCRITURES DE SOI, ÉCRITURES DU CORPS

DU MERCREDI 22 JUILLET (19 H) AU MERCREDI 29 JUILLET (14 H) 2015 (Colloque de 7 jours)

DIRECTION : Jean-François CHIANTARETTO, Catherine MATHA Avec le groupe "Littérature personnelle et psychanalyse"

ARGUMENT :

La question du corps et de la sensorialité, devenue très présente dans la société, envahit les médias et les nouvelles modalités de l’intime rendues possibles par la technologie (blogs, réseaux sociaux, etc.). La surexposition du corps et l’inflation des préoccupations qui le concernent expriment et dénient tout à la fois la dimension sensorielle de l’intime et sa valeur énigmatique. Dans ce contexte, on peut relever la place de plus en plus importante occupée par le corps et la sensorialité dans les écritures de soi, comme dans la clinique psychanalytique. Ces deux types d’expérience de l’intime dans sa relation intrinsèque à "l’extime", de la relation à soi comme intrinsèquement liée à la relation à l’autre, s’éclairent mutuellement aujourd’hui, sans doute davantage qu’hier. Cet éclairage mutuel renvoie indéniablement à l’évolution tant des modalités de l’écriture de soi que de la psychopathologie contemporaine. Et il offre à penser autrement les liaisons et les déliaisons du corps somatique et du corps érotique, du corps à aimer et du corps à détruire, c’est-à-dire du corps et de ce qui l’anime...

Différentes questions seront mises en débat, notamment: le corps dans la cure et les conditions de possibilité de son écriture; la dimension sensorielle de l’intime dans les écritures de soi; du corps de l’auteur au corps du lecteur et inversement; le corps comme lieu et lien d’écritures...

Dans l’esprit des travaux menés par le groupe "Littérature personnelle et psychanalyse" et des précédents colloques organisés à Cerisy, il s’agira de faire dialoguer des écrivains, des spécialistes de la littérature et des psychanalystes autour des différentes formes d’écriture de soi et de leurs ancrages sensoriels. Les écritures de soi, c’est-à-dire, au-delà même des "genres" consacrés (autobiographies, journaux intimes, autofictions, etc.), toute écriture considérée dans sa dimension d’autoprésentation, lorsque l’écrit inclut un certificat d’authenticité produit par l’auteur en personne.

CALENDRIER PROVISOIRE :

Mercredi 22 juillet Après-midi: ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée: Présentation du Centre, des colloques et des participants

Jeudi 23 juillet Matin: Jean-François CHIANTARETTO & Catherine MATHA: Écritures de soi, écritures du corps Camille LAURENS: Le pouls de la langue

Après-midi: Gilles BIBEAU: Jack Kerouac et Neal Cassidy: construction vagabonde d'un mythe de l'américanité Anne ROCHE: Parole voilée

Vendredi 24 juillet Matin: Jacques DAYAN: Le sensoriel comme besoin et comme action Kathleen KELLEY-LAINÉ: Écriture de soi et la langue perdue de l’enfance

Après-midi: Jacqueline ROUSSEAU-DUJARDIN: À propos des lettres de Paul Valéry à Jean Voilier Catherine MATHA: L’intime dans le transfert: du corps à l’écriture

Soirée: Dialogue avec Camille LAURENS

Samedi 25 juillet Matin: Fabrice MOURLON: La place du corps dans les récits traumatiques des survivants du conflit nord-irlandais Georges-Arthur GOLDSCHMIDT: Le mouvement de jeunesse allemand, Wandervogel, 1892-1933: explosion et dévoiement du refoulé

Après-midi: DÉTENTE

Dimanche 26 juillet Matin: Valérie ZENATTI: L’intrafiction ou la matérialisation d’une expérience inscrite à l’encre sympathique Ellen CORIN: Traces sensorielles dans un travail de culture en souffrance

Après-midi: Françoise NEAU: Microgrammes et images de soi: la vie minuscule d'E. L. Jean-François CHIANTARETTO: Présence et absence du corps dans l’écriture de soi

Soirée: Dialogue avec Jacqueline ROUSSEAU-DUJARDIN

Lundi 27 juillet Matin: Bernard CHOUVIER: Pessoa: les autres en soi, le corps en trop Mireille FOGNINI: Empreintes

Après-midi: Claire DE VRIENDT-GOLDMAN: Écrit originaire de soi: fils sensori-moteurs et émotionnels dans la trame psychique Elsa PONCE: Étranger parmi les siens, de la séance à l'écriture

Soirée: Dialogue avec Valérie ZÉNATTI

Mardi 28 juillet Matin: Ghyslain LÉVY: L’écrit de la voix. Entre invisibilité et virtualité Claire NIOCHE: Liaisons et déliaisons du corps de l'écriture (une lecture de Pascal Quignard)

Après-midi: Isabelle LASVERGNAS: Le corps exorbité Liliane CHEILAN: Ce que dit le corps dans la bande dessinée autobiographique. Quelques exemples

Soirée: Dialogue avec Georges-Arthur GOLDSCHMIDT

Mercredi 29 juillet Matin: Discussion générale, bilan et clôture

Après-midi: DÉPARTS

RÉSUMÉS :

Gilles BIBEAU: Jack Kerouac et Neal Cassidy: construction vagabonde d'un mythe de l'américanité S’appuyant sur la définition que Jack Kerouac a donnée de lui-même, l’auteur lit l’immense œuvre du "Ti-Jean" de Lowell comme si elle proposait, à travers une ethno-fiction, la mise en scène imaginaire du mythe fondateur d’un lignage "Canuck", de la Bretagne au Québec et aux États-Unis, et la difficile américanisation d’une famille ouvrière et catholique de langue française dans un des "Petits Canadas" des États-Unis. Jack Kerouac a inventé, avec l’apport des lettres étourdissantes de Neal Cassidy, un style d’écriture automatique inconnu avant lui. Il a mis en mots l’esprit d’une époque dans un des "grands romans américains" du XXe siècle. Le monde imaginaire de Kerouac a été celui de l’exploration intérieure comme chez Walt Whitman et celui de l’excès d’une sensibilité tragique dans une descente en soi jusqu’à la folie et à la mort dans l’alcool. L’auteur montre que la légende franco-américaine de Jack Kerouac a été, pendant quelques années, le mythe du peuple américain.

Gilles Bibeau est anthropologue (médical) et professeur émérite de l'Université de Montréal. Ses secteurs d'intérêt sont l’origine des langues, l’univers des jeunes, les gangs de rue, les systèmes éthiques et juridiques à travers le monde, mes savoirs médicaux africains, la pédiatrie interculturelle, a santé mentale mondiale, la littérature comparée et ethnocritique... En se penchant sur toutes ces questions, l'anthropologue Gilles Bibeau décrypte les grands enjeux qui traversent les sociétés contemporaines et poursuit une réflexion de fond sur ce qui constitue l’humain, mettant en évidence la richesse qu’engendre la différence et en dénonçant les tentatives d’uniformisation destructrices du potentiel de créativité des sociétés humaines. Ce qui l’intéresse, c’est de donner un sens aux similitudes et aux différences qu’il observe à l’échelle de la planète, pour mieux saisir l’être humain dans son unité et dans sa diversité.

Liliane CHEILAN: Ce que dit le corps dans la bande dessinée autobiographique. Quelques exemples Dans la bande dessinée, le récit fonctionnant sur la base d’images, l’auteur prend forcément parti en donnant un corps à ses personnages et les choix de base dans leur représentation — du plus réaliste au plus épuré — ne sont pas sans conséquence sur la signification de l’ensemble. Cependant, à l’intérieur de certaines autobiographies graphiques, comme par exemple Faire semblant c’est mentir de Dominique Goblet, le style adopté pour la représentation d’un personnage n’est pas fixé d’un bout à l’autre et ce sont alors ces variations qui font sens. Significatives aussi sont les différences dans la représentation du corps érotique quand on compare des autobiographies graphiques comme celles de Fabrice Neaud dans son Journal, de Chester Brown dans 23 prostituées ou encore celles de Frédéric Boilet dans L'Épinard de Yukiko ou d’Aurélia Aurita dans Fraise et chocolat. Dans un ordre encore plus intime, le projet de Matthieu Blanchin de rendre compte de son expérience du coma dans Quand vous pensiez que j’étais mort amène à s’interroger sur la représentation du corps en liaison avec les sensations, la conscience de soi et l’existence même de ce corps.

Liliane Cheilan est agrégée de Lettres Modernes, anciennement professeur à l’IUFM-Université de Provence. Actuellement formatrice à l’Institut International Charles Perrault et co-rédactrice en chef de la revue Hors Cadres (http://www.revue-horscadres.com), elle a écrit de nombreux articles portant sur l’album, la bande dessinée et les littératures graphiques en général, parus dans des revues telles que Belphégor, La Revue des livres pour enfants, Griffon ou Hors Cadres et sa version espagnole Fuera de margen, ainsi que dans les actes de divers colloques, dont certains à Cerisy.

Jean-François CHIANTARETTO: Présence et absence du corps dans l’écriture de soi Le 25 novembre 2010, Martin Miller signe une postface à L’essentiel d’Alice Miller, recueil qui réunit les quatre livres principaux d’Alice Miller. Il y affiche une position deux fois unique: définitivement le seul à pouvoir témoigner du développement de la pensée d’Alice Miller, à la fois comme fils et comme thérapeute ayant appliqué ses théories. Que va devenir cette revendication lorsqu’il s’agira, quelques années plus tard, de témoigner de l’expérience traumatique d’avoir été l’enfant maltraité de la théoricienne de la maltraitance de l’enfant? La question du corps comme lieu de la "rencontre du petit garçon ou de la petite fille maltraité(e)", selon les termes de Martin Miller, va s’avérer centrale dans ce changement de perspectives.

Jean-François Chiantaretto est psychologue clinicien, psychanalyste et professeur de psychopathologie à l'Université Paris 13 SPC. Il a fondé et anime le groupe de recherches "Littérature personnelle et psychanalyse". Il a publié ou dirigé de nombreux ouvrages ayant pour thèmes l'écriture de soi, le témoignage, la psychopathologie des limites et l'écriture du psychanalyste. Bibliographie Jean-François Chiantaretto, Le témoin interne. Trouver en soi la force de résister, Paris, Aubier, 2005. Trouver en soi la force d’exister. Clinique et écriture, Paris, Campagne Première, 2011. Martin Miller, Le vrai "drame de l’enfant doué". La tragédie d’Alice Miller, Paris, PUF, 2014. L’essentiel d’Alice Miller, Paris, Flammarion, 2011.

Bernard CHOUVIER: Pessoa: les autres en soi, le corps en trop Par-delà les oripeaux du corps, Fernando Pessoa a cherché dans les pages du journal de son semi-hétéronyme Bernardo Soarès, à atteindre les fondements du soi. À travers une écriture poétique particulièrement remarquable, l’auteur du Livre de l’intranquillité explore les parts archaïques de sa psyché. En mêlant à la fois une analyse quasi-clinique de ses vécus intimes et une description approfondie du monde urbain qui l’entoure, il parvient à dégager de manière saisissante les intrications de sa réalité interne et de sa réalité perceptive. Tout se passe comme si Pessoa tentait désespérément d’effacer sa présence corporelle à travers la quête mystique d’un ailleurs improbable. Expériences de bilocation, tentatives d’excorporéisation, projections à travers des identités multiples sont autant de manifestations exceptionnelles qui parcourent le cheminement de l’écriture de l’intime chez Fernando Pessoa.

Bernard Chouvier, psychologue clinicien, psychanalyste, professeur émérite de psychopathologie à l’Université Lumière Lyon2. Ancien directeur du Centre de Recherches en Psychopathologie et Psychologie Clinique, il a fondé le réseau international interuniversitaire "Cliniques de la Création". Publications Jorge Luis Borges, L’homme et le labyrinthe, Presses Universitaires de Lyon, 1994. Les enjeux psychopathologiques de l’acte créateur (avec Anne Brun), Paris-Bruxelles, de Boeck, 2008. Les fanatiques, Paris, Odile Jacob, 2009. L’archaïque (avec Anne Brun), Paris, Armand Colin, 2012. Pessoa. Un voyage entre rêve et folie, Paris, HD éditions, 2014.

Ellen CORIN: Traces sensorielles dans un travail de culture en souffrance L’écriture de soi est abordée ici sous l’angle de sa participation à un travail de culture lorsque ce dernier se trouve mis à mal tant dans les psychés singulières que sur la scène collective; une participation qui peut se jouer soit en négatif, du côté de l’effraction, soit en positif du côté de l’étayage. Des fragments empruntés à des situations cliniques et à ce qui concerne la scène du monde illustreront trois des chemins à travers lesquels se dessine le fondement sensoriel d’une écriture de soi: celui de l’effraction sidérante, celui de la sensorialité comme abri et comme passeur, et celui où la sensorialité se présente comme un écran dans le double sens d’écran de projection pour l’insoutenable de scènes d’antan et de ce qui fait barrage au rapport à l’autre.

Ellen Corin est psychanalyste, membre de la Société psychanalytique de Montréal. Elle est aussi professeur retraité aux départements d’anthropologie et de psychiatrie de l’Université McGill à Montréal. Ses recherches l’ont amenée en République démocratique du Congo où elle a notamment travaillé avec des groupes de possession par des esprits, au Québec et en Inde où elle s’est intéressée à l’expérience de la psychose et à la voie de l’ascétisme.

Jacques DAYAN: Le sensoriel comme besoin et comme action Croisant l’œuvre romanesque de Maupassant, en particulier les hallucinations négatives du Horla, l’œuvre poétique de Rimbaud, et les hypothèses sur la sensorialité issues des neurosciences, nous essayerons de décrire quelques éléments éclairant la créativité en littérature. Nous partirons de l’hypothèse que le Je de J’écris échappe à la conscience, le plus souvent simple spectatrice de l’action créatrice. Dans cette hypothèse, le corps reste dépositaire d’un "savoir en puissance" qu’illustre au mieux la notion de cognition incarnée. Notre interrogation portera surtout sur les rapports entre conscience et créativité. La conscience sera interrogée, particulièrement à travers l’œuvre de Dennett, l’action à travers quelques aphorismes de Wittgenstein. Des incises seront faites sur les relations entre mécanismes de défense et figures du langage.

Jacques Dayan, chercheur en neurosciences, docteur en psychologie, de formation psychanalytique, est professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’Université Rennes 1. Il assure avec F. Richard la direction de la Revue Adolescence (Paris). Publications Dayan, J., Andro, G., & Dugnat, M. (2014), Psychopathologie de la périnatalité et de la parentalité, Elsevier Masson. Articles en langue anglaise Giffard B., Viard A., Dayan J., et al., "Autobiographical Memory, Self, and Stress-Related Psychiatric Disorders: Which implications in cancer patients?", Neuropsychol Rev., 2013. Guillery B., Clochon P., Giffard B., Viard A., Baleyte J.M., Eustache F., Dayan J.,""Disorganized in the time": impact of bottom-up and top-down negative emotion generation on memory formation among healthy and traumatized adolescents", J Physiol, Paris, 2013. Noël A., Quinette P., Dayan J. et al., "Influence of patients’ emotional state on the recovery processes after a transient global amnesia", Cortex, 2011, 47(8): 981-91. Dayan J. and Oliac B., "From hysteria and shell shock to posttraumatic stress disorder: Comments on psychoanalytic and neuropsychological approaches", J Physiol, Paris, 2010,104(5): 279-286. Articles en langue française Cornalba V., Dayan J., "Bivalence de la sensorialité", Adolescence, 2014, 32, 4, 687-693. Dayan J., "Pour une nouvelle épistémologie", Adolescence, 2013, 1, 181-184. Dayan J., "Depressivité et dépression à l’adolescence", Adolescence, 4/2011 (78), 737-745. Dayan J., Guillery-Girard B., "Conduites adolescentes et développement cérébral: psychanalyse et neurosciences", Adolescence, 2011/3 (n°77), 479-515. Dayan J., "L’autonomie comme valeur", Adolescence, 3/2011 (n°77), 609-614.

Claire DE VRIENDT-GOLDMAN: Écrit originaire de Soi: fils sensori-moteurs et émotionnels dans la trame psychique Cette présentation cherche à saisir par l’écoute sensori-motrice des expressions corporelles et des mots, immanquablement liée aux impacts émotionnels contre-transférentiels de l’analyste, "quelque chose" qui nous renseigne sur la façon dont la trame des premières formes psychiques s’est constituée, et sur la qualité de celle-ci. Les travaux de P. Aulagnier et de I. Matte Blanco serviront de socle théorique pour penser ce premier tissage originaire entre l’être corporel pris dans une relation encore indifférenciée au monde, et les représentations en images et en mots des processus psychiques d’un Soi en devenir. Je propose l’immersion sensori-motrice, hallucinatoire et émotionnelle dans trois situations cliniques — avec un bébé, une petite fille et un adulte — afin d’aller rencontrer cet Originaire de l’écrit de Soi, empreinte indélébile mais oubliée dans la constitution identitaire, au-delà des mots et en-deça des images.

Claire De Vriendt-Goldman est pédopsychiatre et psychanalyste à la Société Belge de Psychanalyse. Elle exerce principalement en libéral. Elle a une pratique hospitalière en Périnatalité à la Clinique Edith Cavell à Bruxelles. Elle est reconnue praticienne du Brazelton, observation active du bébé, qu’elle intègre à la clinique psychanalytique dans la rencontre parents-nourrisson-soignants. Publications "Le contre-transfert, outil thérapeutique fondamental des psychothérapies conjointes parents-bébé", C. De Vriendt-Goldman et C. Frisch-Desmarez, in Revue Belge de Psychanalyse, n°57, Automne, 2010. "Particularités du contre-transfert dans les psychothérapies psychanalytiques précoces", C. Frisch-Desmarez et C. De Vriendt-Goldman, in La Psychiatrie de l’enfant, tome LIV, Fascicule 2, 2011. "The inter-relationship between examiner, infant and parents in the use of the NBAS", C. De Vriendt-Goldman and M. P. Durieux, in The Neonatal Behavioral Assessment Scale, 4th Edition, p 109-113, Mac Keith Press, UK, 2011. "Mélodie des mots, quelques réflexions à propos d’André Green", C. De Vriendt-Goldman, in Revue Belge de Psychanalyse, n°60, Printemps, 2012.

Georges-Arthur GOLDSCHMIDT: Le mouvement de jeunesse allemand, Wandervogel, 1892-1933: explosion et dévoiement du refoulé De sa naissance en 1871, jusqu'à son engloutissement dans la sauvagerie de 1914-1918, la jeunesse de l'empire wilhelminien, comme la société allemande entière, est l'objet de secousses d'autant plus violentes qu'elles sont au point de basculement où le victorianisme et la "pédagogie noire" se trouvent confrontés à l'expansion soudaine de la modernité et, du coup, à l'explosion d'un formidable refoulé. Les prescriptions punitives sont remises en cause, l'écologie apparaît. On invente alors le naturisme (Freiluftkultur). Les adolescents de la classe bourgeoise sont pris de fièvre romantique et érotique souvent à coloration homosexuelle. Après "le suicide de l'Europe" dans la guerre, beaucoup d'entre eux serviront de cadres à la HJ (Hitlerjugend), la jeunesse hitlérienne et participeront, pour la plupart, de loin ou de près, au crime absolu.

Français d’origine allemande, Georges-Arthur Goldschmidt, né en 1928, fuit le nazisme, en France; il a traduit en français, Franz Kafka, Friedrich Nietzsche, Adalbert Stifter, Georg Büchner, Walter Benjamin et Peter Handke, lequel a traduit en allemand, Le miroir quotidien et La forêt interrompue (Le Seuil) de Georges-Arthur Goldschmidt. En 2000 paraît La Traversée des fleuves. En 2004, Prix France-Culture pour Le poing dans la bouche. Il écrit sur la langue de la psychanalyse (Quand Freud voit la mer, et Quand Freud attend le verbe) (Buchet-Chastel), sur le langage A l’insu de Babel (CNRS) et sur Kafka: Celui qu’on attend habite juste à côté (Verdier) et L’Esprit de retour (Seuil).

Kathleen KELLEY-LAINÉ: Écriture de soi et la langue perdue de l’enfance C’est une bien curieuse chose d’écrire dans une langue étrangère lorsqu’on a du abandonner sa langue maternelle dès l’enfance. Pour Nata Minor, "la langue d’origine, tombée dans l’oubli agissait à bas-bruit... L’ensemençant, favorisant, par son affleurement, par l’effort qu’elle imposait, l’émergence d’une langue tierce et qui donnait au corps de l’écrit son ancrage indispensable" (1). C’est à partir de notre rencontre à Cerisy sur ce thème que je me suis mise à réfléchir à ce que "écriture de soi" représentait pour moi... J’ai évidemment pensé au livre Peter Pan ou l’enfant triste où j’ai découvert par hasard, et par surprise, mon "écriture de soi". Peter Pan est l’histoire d’un enfant perdu, de l’enfance perdue — je n’avais aucunement conscience que j’allais retrouver "ma langue perdue", le hongrois tout en l’écrivant en langue française, langue adoptée à l’âge adulte. Je tenterai d’explorer la dynamique psychique alors inconsciente de ce qui m’a amené à écrire Peter Pan ou l’enfant triste comme une nécessité pulsionnelle. (1) Nata Minor, "Écriture du Trauma" dans Écriture de soi et trauma, sous la direction de Jean-François Chiantaretto, Anthropos 1998, p. 277.

Kathleen Kelley-Lainé est psychanalyste, membre de la Société Psychanalytique de Paris, et de la Société Internationale Sandor Ferenczi. Dans sa pratique clinique avec des adultes et adolescents, elle travaille en français, anglais et hongrois. Publications Peter Pan ou l’enfant triste, Paris, Calmann-Levy, 1992, 2005 (Analyse in: Le Coq Héron, 1993, 127, 87-88, par Daubigny-Perianez; Les Textes du Centre Alfred Binet, 1992, n°20, par D. Diatkine; Lectures, 1993, n°3, par R. Perron). Contes cruels de la mondialisation, avec D. Rousset, Paris, Bayard Ed., 2001. Sandor Ferenczi (1873-1933), avec T. Bokanowski, G. Pragier, Paris, PUF, 1995. "La langue maternelle de Ferenczi", in T. Bokanowski, K. Kelley-Lainé, G. Pragier, L’enfant qui pleure dans l’adulte: "le complex de Peter Pan", Revue Française de Psychanalyse, 1994, vol. 58, n°3, pp. 875-883. "Never Neverland: L’Ile de l’éternelle enfance", Perspective Psychiatrique, 1989, n°20, pp. 336-340. "Peter Pan pour les enfants qui ne veulent pas grandir", in B. Lechevalier, G. Poulouin, H. Sybertz (dir), Les contes et la psychanalyse, Paris, In Press, 2001, pp. 225-235. "A la recherche de Peter Pan: la psychothérapie d’enfant dans l’adulte", in J.C. Rouchy (dir), La psychanalyse avec Nicolas Abraham et Maria Török, ERES, 2001, pp. 171-176. "Une mère, une terre une langue: la place de la relation mère/enfant dans la psychanalyse hongroise", in Le Coq Héron, 1992, n°125, pp. 53-56. "Conversation avec le Pr. Freud" (préface & traduction), interview par Zsofia Denes, RFP, 1988, vol. 52, n°4, pp. 939-948.

Isabelle LASVERGNAS: Le corps exorbité La pratique clinique du psychanalyste le confronte parfois à des problématiques psychiques chez lesquelles des désordres graves du corps, auto-imposés ou subis (anorexie mentale, obésité pathologique, mais aussi prolifération de tatouages), ont transformé l’apparence physique de la personne au point de faire de son "nouveau corps", un dédoublement de soi dans un effet d’étrangéité. De telles expériences de vacillement du corps propre et de perte des limites corporelles qui débordent le champ du langage verbal seront confrontées à deux œuvres picturales dans l’histoire de l’art du XXe siècle (Frida Kahlo et Hélène Schjerfbeck), caractérisées par une pratique intensive de l’autoportrait sous-tendue par l’épreuve pathique d’un corps blessé ou mutilé. On posera la question des tentatives d’auto-réparation narcissique dont ces œuvres témoignent, entre effraction de l’enveloppe psychique, éprouvés de morcellement, récupération héroïque d’un corps érogène, et tentative de reconstruction spéculaire d’une image identitaire unifiée.

Isabelle Lasvergnas est professeur titulaire, UQAM (Université du Québec à Montréal) et psychanalyste, membre de la Société canadienne de psychanalyse.

Bibliographie D. Anzieu, Le moi-peau (1974, 1995). J.-J. Baranes, Langages et mémoire du corps en psychanalyse (2012). S. Freud, Le Moi et le Ça (1923). G. Guillerault, Le corps psychique (1995). P. Guéry, Erotographie (2007).

Camille LAURENS: Le pouls de la langue Dans Le temps retrouvé, Proust évoque "le livre intérieur", "le plus pénible de tous à déchiffrer", "le seul dont l'impression ait été faite en nous par la réalité même" et qu'il nous appartient de "tirer de l'obscurité qui est en nous" pour l'exprimer sur la page. Duras parle de "l'ombre interne", du "chaos primitif de l'écrit — total, illisible", que le travail de l'écrivain doit ensuite "alléger", "éclairer". Comment faire passer dans la langue écrite quelque chose de ce que le réel a imprimé en nous, dans notre chair? Jusqu'à quel point la structure du texte, le choix des mots, la syntaxe, le rythme peuvent-ils rendre compte de ce que notre corps enregistre consciemment ou non d'émotions vitales et mortelles? Le pouls de la langue peut-il traduire et ressusciter les pulsations, pulsions et impulsions du corps désirant, du corps jouissant, du corps souffrant? C'est le rêve beau et fou des écrivains.

Agrégée de Lettres modernes, Camille Laurens a enseigné en Normandie et au Maroc. Elle vit maintenant à Paris. Elle est l’auteure de huit romans, parmi lesquels Dans ces bras-là (POL, Prix Fémina 2000, prix Renaudot des lycéens), L’amour, roman (2003), Ni toi ni moi (POL, 2006), Romance nerveuse (Gallimard, 2010), de plusieurs récits, dont Philippe (1995) et de deux essais: Les Fiancées du diable, enquête sur les femmes terrifiantes dans l’art (ed. du Toucan, 2011) et Encore et jamais, variations (Gallimard, 2013). Elle poursuit parallèlement un travail sur la langue: Quelques-uns (1999), Le grain des mots (2003), Tissé par mille (2008). Pour le théâtre, elle a écrit dans l’ouvrage collectif Les cinq doigts de la main (Actes Sud, coll. "Heyoka") un texte destiné au jeune public, ainsi qu’une pièce créée par Virginie Deville dans le cadre du spectacle Corpus Eroticus et un duo pour deux comédiennes, Eurydice ou L’homme de dos (Avant-scène/théâtre, 2011) qui revisite le mythe d’Orphée. Plusieurs de ses romans ont été adaptés à la scène, notamment à Paris et à Genève. Elle vient de publier un texte sur Louise Labé dans le recueil collectif L’une et l’autre (L’Iconoclaste, 2015) et travaille actuellement à l’adaptation de son roman Dans ces bras-là à l’écran. Elle est traduite dans une trentaine de langues.

Ghyslain LÉVY: L’écrit de la voix. Entre invisibilité et virtualité C'est sur ce thème du Navire "Night" que je suivrai Marguerite Duras dans son exploration nocturne de la place de la voix comme la part d'invisibilité de la parole, ce qui, dans la parole, s'absente, pour que, dans son manque, celle-ci rende la voix désirable. Je voudrais faire jouer cette expérience littéraire de la voix avec celle que nous partageons dans la cure psychanalytique autour du silence, de la non-visibilité de l'analyste, de l'étrangeté de la voix... Mais je voudrais aussi faire jouer cette question de la sensorialité du corps de la voix au regard de ce qu’est aujourd'hui la place de la voix désincarnée, artificielle, technique, celle que les technologies de la communication nous proposent pour se substituer au rapport à l'autre comme sujet du non-rapport. Je me réfèrerai au film "Her" de Spike Jonze (2013), qui interroge sur le mode de la projection dans un futur "technologique" ce que deviennent aujourd'hui les relations amoureuses, sous le signe du déni, de la perte et du manque.

Ghyslain Lévy est psychanalyste à Paris. Membre du Quatrième Groupe. Publications récentes Le don de l’ombre, Éditions Campagne Première, 2014. L’ivresse du pire, Éditions Campagne Première, 2010.

Catherine MATHA: L’intime dans le transfert: du corps à l’écriture Pour des sujets dont la destructivité s’est inscrite dans le corps, s’engager dans une cure est déjà accepter pour partie que les blessures du corps témoignent de blessures de l’âme. Mais de soi à l’autre, le chemin est inquiétant: l’insuffisance des différenciations, marque d’un monde interne mal délimité, nourrit des figures du négatif dont l’expression touche indissociablement les possibilités d’auto-représentation du patient et les liens à l’analyste. La sensorialité, en tant qu’elle permet à la psyché de s’auto-informer, notamment sur ses états affectifs, occupe en ce cas une place centrale dans la dynamique transférentielle, tant du côté du patient que de l’analyste. Elle participe ainsi de l’avènement de l’intime, dans la création d’une place inédite faite à l’altérité; ce dont l’écriture peut témoigner dans l’après-coup, au su et à l’insu de l’auteur, analysant ou analyste.

Bibliographie Aulagnier P. (1975), La violence de l’interprétation, Paris, Le fil rouge, PUF. Green A. (1973), Le discours vivant, Paris, Le fil rouge, PUF. Green A. (1993), Le travail du négatif, Paris, Editions de Minuit. Matha C. (2011), Blessures de l’adolescence, Pbp, PUF. Matha C. (2015), "Transfert et répétition: les empreintes de la perte et leur mise en représentation", in Les travaux forcés de la répétition, Pbp, PUF.

Fabrice MOURLON: La place du corps dans les récits traumatiques des survivants du conflit nord-irlandais L’Accord du Vendredi Saint signé en avril 1998 à Belfast a permis à l’Irlande du Nord de s’engager dans un processus de paix durable après 30 années de conflit. Les antagonismes politiques, sociaux et constitutionnels semblent avoir trouvé une issue favorable. Même si des désaccords subsistent entre les camps opposés, la violence a pratiquement cessée. Après des années de silence, les survivants ont commencé à s’exprimer au sein de groupes d’entraide et/ou de manière publique, notamment dans des publications et dans les médias, après que leur statut a été officiellement reconnu et une aide gouvernementale leur a été accordée. Leurs témoignages ont été recueillis par l’intermédiaires d’universitaires ou de responsables associatifs, et en novembre 2014, un site officiel tente de les regrouper: "Accounts of the Conflict". Ces récits courts et épars ont une valeur thérapeutique pour les survivants qui en même temps tentent, soit de transmettre leur expérience pour que la violence ne se répète pas, soit de dire leur vérité sur les crimes du passé dans un souci de justice et de réconciliation. Ils mêlent l’intime à l’extime où la description du corps est exposée mais parfois aussi cachée. L’analyse d’un corpus de témoignages tentera d’expliquer ce double mouvement.

Fabrice Mourlon est Maître de conférences angliciste à l’Université Paris 13. Après avoir soutenu sa thèse de Doctorat sur "l’aide aux victimes du conflit nord-irlandais: 1969-2006" en juin 2009, ses recherches se sont portées sur la nature et la valeur du témoignage dans les sociétés post-conflit. Publications "La place des victimes dans le processus de paix et de réconciliation en Irlande du Nord", in Jean-Paul Barbiche, Ludmilla Ommundsen (dir.), Sociétés réconciliées? Des peuples à la recherche d’un compromis entre passion et raison, Paris, L’Harmattan, 2007. "Revisiter le passé: un difficile processus en Irlande du Nord", in Sylvie Mikowski (dir.), Histoire et mémoire en France et en Irlande, Reims, Epure, 2011. "Assessing the achievements of assistance to the victims of the conflict in Northern Ireland”, in Grainne O’Keeffe, Lesley Lelourec (eds), Victims and Ireland: Confronting the Past, Forging the Future, Oxford, Peter Lang, 2012, pp 189-209. "Official Responses to Dealing with the Past in Northern Ireland: Between Remembering and Forgetting", E-rea En ligne: http://erea.revues.org/28..., 10.1 | 2012, mis en ligne le 20 décembre 2012.

Claire NIOCHE: Liaisons et déliaisons du corps de l'écriture (une lecture de Pascal Quignard)

Dans cette lecture de l’œuvre de Pascal Quignard, la relation de l’écriture au corps, et du corps à l’écriture, est tendue jusqu’à penser l’écriture comme corps, organique et vulnérable aux puissances de liaison et de déliaison. "La pluie des êtres ne s’interrompt pas. Tout dévale dans la nuit. Quelques fantasmes forment des ligatures, laçant des simulacres, des schèmata, des images" (Rhétorique spéculative, 1996). Mais en deçà ou au-delà des ligatures, des nœuds, des liens et des associations poétiques, l’écriture met en lumière le caractère irrémédiablement fragmenté du langage, "les pierres descellées de sa ruine". Or "c’est le corps qui investigue le langage", et, pour le lettré, la lettre se fait organe, organe des deux pathos, thanatique et érotique. Ainsi espérons-nous éclairer la violence souterraine des relations de l’écriture et du corps, dont témoigne le corps mis à mal de l’écrivain tourmenté du "souci atomique des literae" et qui, dans l’effroi, ne cesse de remonter de la convention de langage et d’écriture au fonds biologique qui l’origine. Claire Nioche, ancienne élève de l’ENS, est maître de Conférences à l’Université Paris 13.

Articles en lien avec le colloque

"Le motif des ruines dans Les Géorgiques de Claude Simon", in Claude Simon, Les Vies de l’archive, sous la direction de Mireille Calle-Gruber, Editions Universitaires de Dijon, collection Ecritures, juillet 2014. "Écrire la guerre: expérience, mémoire, transmission", postface à Le Feu, de Henri Barbusse, Petite Bibliothèque Payot, mai 2014. "Maurice Blanchot: déserter le mythe", Topique, n°124, septembre 2013. "De l’écriture en psychanalyse", Cliniques méditerranéennes, érès, n°86, 258 pages, p. 123 à 139, 2012.

Elsa PONCE: Étranger parmi les siens, de la séance à l'écriture

En quoi la création d'intime énigmatique se rencontre au cœur de la séance d'analyse? Là où l'énergie, l'intensité, l'ardeur de la sensorialité peuvent être vécues comme effractantes, voire comme nécessaire obstacle à l'intime, existe-t-il, dans la séance d'analyse, un espace pour l'improvisation sensitive, "écritures du corps"? Peuvent-elles être ensemble pensées comme corps du contact intime partagé qui doit être accueilli, nourri, sillonné en tout sens? Qu'en est-il de ces chercheurs, interprètes, compagnons, deviendront-ils auteurs du "voyageur inconnu"(1), œuvre élaborée, éprouvée par le couple en séance? Comment l'écriture peut-elle porter la densité, la teneur de la pensée; la densité, la tension de l'expérience? À l'unisson, le clinicien ne devient-il pas étranger parmi les siens — les mots, l'écriture, ses théories, ses auteurs; le patient n'advient-il pas étranger parmi les siens? Sur le chemin d'une pluralité de mouvements migratoires, ils se réinventent sans cesse, laissant évoluer, muer le roman familial, "écritures de soi", "écritures de sois", à l'aune du couple qu'ils forment. (1) Aragon L., "J'arrive où je suis étranger", La Diane française, 1944 (écrit durant la Seconde Guerre mondiale).

Bibliographie

Ernaux A., Les Armoires vides, Gallimard, 1974. Ernaux A., L'écriture comme un couteau, Entretiens avec F. Y. Jeannet, Stock, 2003. Ferro A., La psychanalyse comme littérature et thérapie, érès, 2005. Chiantaretto J.-F., Trouver en soi la force d'exister, CampagnePremière, 2011. De Toledo C., L'inquiétude d'être au monde, Verdier, 2012. Ogden T. H., Cet art qu'est la psychanalyse. Rêver des rêves inrêvés et des cris interrompus..., Ithaque, 2012. Jullien F., De l'intime, Loin du bruyant amour, Grasset, 2013.

Anne ROCHE: Parole voilée

En Iran, le corps n’est certes pas "surexposé", mais il fait bien l’objet d’une "inflation de préoccupations", même si elle se joue différemment de ce que nous connaissons en Occident. La littérature écrite par des Iraniens (en persan ou parfois dans des langues d’accueil quand ils sont en exil) en prend acte et le rejoue à sa manière, soit en mettant en abyme l’occultation des corps (Shariar Mandanipour, Azar Nafisi), soit en passant par le mythe (Sorour Kasmaï), soit en transférant sur un personnage au corps privé de parole (il est sourd-muet) la difficulté de l’expression de l’intime (Kader Abdolah.) Je propose à travers ces exemples d’envisager les possibilités de l’écriture du "sens" quand les manifestations du corps font l’objet de divers interdits. __ Jacqueline ROUSSEAU-DUJARDIN: À propos des lettres de Paul Valéry à Jean Voilier__ Les lettres de Paul Valéry à Jean Voilier, publiées en juin 2014, confirment, sinon révèlent, l’évolution de l’auteur vers un vécu et une conception de l’amour s’effaçant jusque là devant le règne de l’esprit. Il découvre en lui, petit à petit, une "transformation" dont il s’agira de repérer les prémices et de suivre le développement à travers des acmés de souffrance et de plaisir qui donnent à ce texte un caractère bouleversant.

mise en ligne par Isabelle Grell